Le cépage malbec a, depuis longtemps,
trouvé à Cahors un terroir de prédilection. En 1861, l’Argentine lui
offrait une nouvelle terre promise. Dans ces deux vignobles, le malbec
produit aujourd’hui des vins ambitieux, au style marqué : l’équilibre
classique des cahors s’oppose à la « solarité » argentine.
Par Pierre Casamayor.
Le malbec, cot ou auxerrois, est un cépage typique du sud-ouest de la
France.
Son terroir d'élection est à Cahors, sur les terrasses de la vallée du Lot
ou sur les causses. Cépage coulard, il produit néanmoins des vins de
couleur intense. Au Moyen Âge, le Black Wine des Anglais renforçait
souvent la robe des clarets bordelais. Le malbec développe un fruité
intense, sa note de violette signe le terroir cadurcien. Il présente une
structure tannique élevée, parfois un peu rustique.
Un cépage "intéressant"
Le malbec a été importé en Argentine à partir de 1861, date à laquelle le
président Domingo Faustino Sarmiento demande à Aimé Pouget, un viticulteur
français expatrié, d'importer des cépages "intéressants" de France. Le
malbec a montré une capacité d'adaptation étonnante, car si le fruité
signe ses origines, ses tanins mûrissent et se veloutent sous le soleil
argentin, surtout dans la région de Mendoza, à l'ouest, près de la
frontière chilienne. L’Argentine élabore aujourd'hui des vins ambitieux,
les œnologues français apportant savoir-faire et investisseurs hexagonaux.
La RVF a donc confronté les vins issus de ce cépage planté des deux côtés
de l'Atlantique. Le résultat est net, les styles divergent sans équivoque,
et si parfois quelques vins ont eu du mal à être identifiés, c'est plus
une question de style du boisé et d'extraction poussée que de matière
première, certains cahors jouant l'exotisme.
L'équilibre, juge de paix
Les cahors - tous des 2000 - arrivent largement en tête. La raison? Leur
équilibre classique. Élevés en bois neuf, ces vins haut de gamme imposent
leur austérité racée, leur structure tannique droite, soutenue par une
nervosité rafraîchissante.
Pour l'Argentine, les millésimes étaient divers, la France importe peu de
vins argentins. Quant au style, il est le strict opposé des vins de
Cahors. Ici, on joue la gourmandise immédiate et le fondu des structures.
Le fruité est plus évolué, plus compoté, soleil oblige. Les tanins sont
très fondus, mais le défaut majeur réside dans une acidité corrigée qui
apparaît comme étrangère à l'équilibre, d'autant que la chaleur alcoolique
est souvent élevée et le boisé très appuyé, ce qui donne des finales à
sucrosité élevée, fatigantes. Ici, comme à Cahors, quelques extractions
sont apparues excessives, alors que les raisins devaient être superbes.
Enfin, les deux vins les plus chers de la dégustation, un cahors et un
argentin, sont loin d'arriver en tête. De bons rapports qualité/prix se
dégagent en haut du tableau.
PRIMO PALATUM
Cahors
« Classica »
2000
7,3/10
Robe sombre, nez ouvert, avec un fruité noir, du poivre, des épices, un
boisé exotique marqué mais bien maîtrisé. Bouche puissante, veloutée, avec
une trame affinée, un fruité plutôt gourmand, des tanins encore serrés.
Bel équilibre entre matière et fraîcheur.
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